Qu’avez-vous donc écrasé !

N° 257 - Publié le 1 décembre 2014
© Gretia
Certaines espèces, comme cette Dolomède frangée, sont semi-aquatiques et peuvent marcher sur l’eau grâce aux poils hydrofuges qui ornent leurs pattes.

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Chacun la croise presque tous les jours mais la connaît peu. Petit portrait d’un animal plus complexe qu’on ne le croit.

Elle a huit pattes... non dix... non six... Enfin, elle en a plein. Notre idée des araignées se résume bien souvent à un animal tout noir, velu et qui court au moins plus vite qu’un guépard !


Pourtant, « pour faire partie de l’ordre des araignées, il faut remplir des conditions bien précises », explique Frédéric Ysnel, arachnologue à l’Université de Rennes1.

Commençons par le nombre de pattes. « Il en faut huit pour marcher, précise le scientifique, pas une de plus, pas une de moins. Il lui faut aussi une paire de pédipalpes, ou “pattes mâchoires” qui servent à attraper la nourriture. » Et pour compléter le tout, « une paire de chélicères munis de crochets qui permettent d’inoculer du venin aux victimes. »

À la différence des insectes, le corps de l’araignée est scindé en deux parties, et non en trois. Vers l’avant, le céphalothorax, un complexe tête-thorax “deux en un” sur lequel sont fixées les six paires d’appendices articulés. Derrière, l’abdomen, sur lequel on trouve les filières d’où est extraite la soie. Côté vision, l’araignée n’est pas une taupe, mais toutes n’ont pas la vue aiguisée d’un chat. « Elle a entre zéro et huit yeux simples qui lui donnent – ou pas – une vue globale du monde qui l’entoure mais à faible distance. » Peu de risques donc, qu’elle vous identifie pour se venger si vous la chassez du haut de votre balai.

Elle liquéfie ses victimes

Si elle a une bouche, l’araignée n’a pas de dents. Elle ne peut pas consommer directement ses proies. Alors, en règle générale, elle les boit. « Elle leur injecte des sucs venant des chélicères et des glandes salivaires, qui liquéfient l’intérieur de la victime, détaille Frédéric Ysnel. En fait, elle la digère avant même de la manger. Elle peut ensuite malaxer le résultat pour obtenir une sorte de bouillie, ou piquer la proie et aspirer le contenu, cela dépend des espèces. Elle utilise alors son jabot aspirateur, qui lui tient lieu d’estomac, comme pompe à vide pour attirer le liquide vers l’intérieur. » Et, pour être sûre qu’un petit morceau ne vienne troubler son déjeuner, sa bouche filtre tous les éléments solides supérieurs à un micromètre (0,001 mm). Si cette étape de contrôle ne suffit pas, son pharynx, en arrière de la bouche, râpe les éléments restant comme le ferait du papier de verre. Lorsqu’elle a fini son repas, il ne reste parfois de la proie qu’une enveloppe vide.

« Plongées dans l’alcool, les araignées se conservent plusieurs dizaines d’années », confie Frédéric Ysnel en présentant des petites mygales méridionales.
© Céline Duguey

Le mille-pattes pour cousin

Pour distinguer une espèce d’araignée d’une autre, il existe une technique imparable ou presque : leurs pièces génitales.
Les organes génitaux des mâles et des femelles fonctionnent comme une clé et une serrure. Et la serrure est propre à chaque espèce. Cela leur permet d’éviter les croisements. À plus grande échelle, « l’araignée fait partie de la classe des arachnides, dans laquelle se retrouvent aussi les scorpions, les acariens et les araignées des champs, ou faucheux. Malgré leur nom, ces derniers ne sont pas des araignées car, entre autres, ils ne produisent pas de soie. » Sur les 60 000 à 70 000 espèces d’arachnides connues, on ne compte pas moins de 40 000 espèces d’araignées. « Et encore, nous sommes probablement loin de la vérité, nous connaissons très peu la biodiversité. » Parmi ses cousins plus lointains se trouvent tous les chélicériformes. Des animaux marins, les limules ou les pycnogonides, en font partie. Et tous sont inclus dans l’embranchement des arthropodes. « Ce sont les invertébrés possédant un squelette externe et des pattes articulées, comme les crustacés, les insectes et les mille-pattes, par exemple. » Et le mille-pattes, combien de pattes a-t-il, lui ?

Céline DUGUEY

Frédéric Ysnel
Tél. 02 23 23 58 99
frederic.ysnel [at] univ-rennes1.fr (frederic[dot]ysnel[at]univ-rennes1[dot]fr)

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