Domotisée du sol au plafond !

N° 335 - Publié le 12 novembre 2015
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Dans ce projet européen, des étudiants bretons poussent la domotique à l’extrême pour concevoir une maison idéale.

Comment sera la maison de demain ? Des étudiants de huit établissements bretons(1) travaillent depuis 2014 pour proposer un aperçu de leurs réflexions, sous la forme d’un prototype d’habitat durable. Le projet Team Solar Bretagne s’appuie sur le partage d’une pièce à vivre. Mais à la différence de l’habitat métamorphique, celui-ci concerne la transformation des maisons anciennes, très courantes dans les bourgs et les faubourgs des métropoles. « C’est le postulat de base. Après, nous voudrions que l’ensemble de cet habitat soit économe en énergies. Et l’une des clés pour y arriver, c’est la domotique », explique Inès Alleaume, une étudiante de l’École supérieure d’ingénieurs de Rennes (Ésir) très impliquée dans le projet.

Tester des technologies locales

La domotique est l’ensemble des techniques de l’électronique, de l’informatique et des télécommunications utilisées dans les maisons. Souvent présente pour automatiser du matériel, elle peut aussi, dès la phase de conception, faciliter l’organisation des professionnels du bâtiment. « L’architecte, le plombier et l’électricien ont chacun leur logiciel de travail. Ils produisent des plans du logement incluant les réseaux qui les concernent, mais on ne peut pas combiner ces fichiers informatiques puisqu’ils n’ont pas le même format. » Les étudiants de l’option Tic du bâtiment (TicB), à l’Ésir, mettent au point un format commun pour pouvoir importer tous les fichiers dans une même modélisation en 3D. « Par la suite, cette maquette pourrait servir d’outil de diagnostic en temps réel de la maison », dit Inès Alleaume. Avec ses collègues de l’Ésir et des autres établissements, elle pilote une dizaine d’autres études, comme la ventilation naturelle. « L’air n’est pas assez renouvelé dans un bâtiment bien isolé. Nous avons donc imaginé un puits au plafond qui laisse passer l’air via des petits clapets qui s’ouvrent et se ferment en fonction de la qualité de l’air mesuré par un capteur connecté. » Pour le chauffage, d’autres solutions sont envisagées : « Si l’on connecte un radiateur à une station météo, il peut s’allumer ou s’éteindre selon le temps prévu dans les heures à venir. »

Le projet Team Solar est aussi l’occasion de tester des technologies locales, telles que le réseau sans fil de communication par la lumière, développé actuellement par Oya Light (lire ci-dessus). « Le Li-Fi remplace le Wi-Fi dont on ne connaît pas l’impact magnétique sur l’environnement », précise Inès Alleaume. L’entreprise Schneider Electric, basée à Chartres-de-Bretagne, a par ailleurs fourni un onduleur chargé de diriger l’énergie produite (par des panneaux solaires, par exemple) soit vers une batterie de stockage, soit vers le réseau pour une consommation immédiate. « Avec l’aide de l’Institut d’aménagement et d’urbanisme de Rennes, nous questionnons l’habitat à l’échelle d’un quartier, ajoute l’étudiante. Comment la domotique peut-elle faciliter le partage d’énergies entre voisins ? Comment peut-elle faire évoluer les modes de déplacements ou la gestion des déchets ? »

Un premier prototype de 11 m² fera un tour de Bretagne à partir de mars 2016 afin de sensibiliser le public. L’habitat final, d’une surface de 110 m², sera quant à lui présenté au concours européen Solar Decathlon 2017. « La réflexion sur le bâtiment connecté a bien évolué depuis le premier colloque Tic et Cité de Rennes 1, en 2003, confie Patrice Barbel, responsable de l’option TicB à l’Ésir. À l’époque, on était focalisé sur les nouvelles technologies sans penser à leur utilité. Aujourd’hui, l’objectif d’économie d’énergie tout en conservant le confort de l’usager justifie le déploiement de la domotique. »

Une autre utilisation des lumières du plafond

Enseignant-chercheur à l’Irisa(1) et spécialiste des objets connectés, Frédéric Weis était à la recherche de services nouveaux à rendre dans l’habitat. « Nous souhaitions aussi nous appuyer sur un élément qui existe déjà pour ne pas ajouter un capteur de plus dans la maison », explique-t-il. La lumière est venue... de l’éclairage Led(2) ! Qui va arriver en masse dans le bâtiment. « Nous étions en contact avec l’entreprise Oya Light(3), spécialisée dans les Led et qui, de son côté, avait besoin d’innover(4) dans le domaine des objets connectés. C’est comme cela que nous est venue l’idée de réfléchir à une autre utilisation des dalles lumineuses qui sont au plafond. » Le projet a démarré en janvier dernier grâce à un financement de la Région Bretagne et un étudiant en thèse Cifre(5). Résultat : les dalles lumineuses deviennent un élément de signalétique pour l’aide à l’évacuation en cas d’alerte incendie. Le déclenchement du détecteur de fumée envoie un signal qui commande à certaines dalles de s’éteindre et celles qui restent allumées deviennent un chemin lumineux. « Le tracé peut être reconfiguré. La difficulté a été de synchroniser automatiquement les dalles..., ajoute le chercheur. L’idée, maintenant, serait d’associer aux dalles un détecteur de présence et de montrer qu’un objet connecté peut agir dans les deux sens. » Une première démonstration est prévue à la fin de l’année.

Nathalie Blanc
Frédéric Weis
tél. 02 99 84 75 42
frederic.weis@irisa.fr
Klervi L'Hostis

(1) Institut de recherche en informatique et systèmes aléatoires (Université de Rennes 1, Insa Rennes, Inria, ENS Rennes, Télécom Bretagne, UBS, CNRS).

(2) Lire le dossier sur la lumière de Sciences Ouest n° 332 - juin 2015.

(3) Basée à Châteaubourg (Ille-et-Vilaine).

(4) Oya Light travaille aussi sur le développement du Li-Fi, un réseau sans fil basé sur les ondes de la lumière (lire article ci-contre).

(5) Convention industrielle de formation par la recherche.

(6) École nationale supérieure d’architecture de Bretagne, École supérieure d’ingénieurs de Rennes, Université Bretagne-Sud, lycée Juliot-Curie, IUT de Rennes, Insa de Rennes, Institut d’aménagement et d’urbanisme de Rennes et École européenne supérieure d’art de Bretagne.

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