Des drones en meutes, dans l’air et sous l’eau

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N° 340 - Publié le 15 mars 2016
Photo : N. Guillas
Dans une salle expérimentale de 90 m3 à l’Inria, trois drones coordonnent déjà leurs vols. Dans deux ans, six drones sauront naviguer de conserve pour orienter un robot au sol.

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Les drones ne doivent plus seulement voler. Dans l’air ou même sous l’eau, ils apprennent à se coordonner pour s’orienter en groupe autonome.

Pour les hommes ou les robots, trouver son chemin est un jeu d’enfant grâce au système GPS. Mais dans une zone non couverte par les satellites, comme dans un bâtiment inconnu, se repérer est alors plus compliqué. À l’Irisa à Rennes, le chercheur Paolo Robuffo Giordano (1) a une idée. Il veut inventer un système de géolocalisation local, en remplaçant les satellites GPS par une flottille coordonnée de drones. Son projet SenseFly (2) est basé sur la recherche en mathématiques, appliquée à la robotique. « L’objectif est de faire voler des drones en formation. En général, quand un drone vole en extérieur, il utilise le GPS. À l’intérieur, cela nécessite des caméras au plafond, pour localiser le drone et estimer sa vitesse. Mais comme les animaux, les drones devraient être capables de tout faire, avec des capteurs embarqués. »

Un robot à terre

Les capteurs des drones sont des caméras. « Chacune a un champ visuel limité. Une caméra ne peut pas voir tous les autres drones, ni tous les obstacles dans une salle. Mais en échangeant des informations entre eux, les drones se localisent les uns par rapport aux autres. » Le but final n’est pas seulement de créer une bande de copains drones, qui progressent en milieu inconnu. « Ces drones peuvent dire à un robot mobile à terre où il est, ce qu’il doit faire. Ils jouent le rôle de satellites, avec l’avantage d’être mobiles. »

Le projet a commencé l’an dernier. Les équations sont testées actuellement avec trois drones (3). Un robot roulant complétera ensuite le dispositif. À la fin du projet, en août 2018, six drones guideront un ou plusieurs robots ! Et surtout, les algorithmes seront valables quels que soient les machines et leur mode de communication (Wi-Fi ou ondes radio) : « C’est-à-dire toutes les fois qu’un véhicule autonome se déplace dans un environnement compliqué, résume Paolo Robuffo Giordano. Par exemple en sous-sol, dans un bâtiment détruit par un tremblement de terre, ou dans l’espace, une flottille de satellites, en mouvement cette fois, pourrait orienter une navette. »

drone

À gauche : Ce robot sous-marin de la société innovante RTsys s’oriente seul dans l’océan, en communiquant avec une dizaine d’autres robots. RTSys
 

À droite : Le drone sous-marin, propulsé par un moteur électrique, peut devancer automatiquement un zodiac, tout en visualisant le fond de la mer. RTSys

Des drones marins

Ce type de recherches, pour apprendre aux robots à se mouvoir en formation, est aussi mené par des entreprises innovantes. À Caudan, près de Lorient, RTsys met au point des drones marins. Le projet Comet, finalisé l’an dernier, avait pour but de concevoir des robots à bas coût, qui naviguent en meutes (jusqu’à une dizaine). Ce sont des tubes de deux mètres de long, qui turbinent à 15 km/h.

« Sous l’eau, les engins ne communiquent pas en utilisant des moyens simples, comme la radio, explique Raphaël Bourdon, le directeur technique d’RTsys. Les ondes électromagnétiques ne passent pas. Il faut utiliser des ondes acoustiques, même si elles ont un débit très faible. Nous avons mis au point des protocoles dédiés, pour que les robots puissent échanger des informations grâce au son. » Cette recherche a été faite avec des partenaires scientifiques, dont l’Ensta Bretagne et Télécom Bretagne (4).

Parmi les applications, comme l’ont montré les essais entre Lorient et Groix, deux drones savent précéder automatiquement un zodiac. Ou suivre un robot principal.

« L’intérêt, c’est que nous pouvons mailler une zone pour visualiser le fond marin. » Cela fonctionne à grande distance : en décembre, un drone sous-marin communiquait avec une balise située à 5000 m de distance.

Les résultats du projet Comet, qui constitue une innovation mondiale, servent à d’autres projets. Les clients de RTsys sont dans le secteur de la Défense (déminage), ou réalisent des missions scientifiques (prospection de fonds marins) et environnementales (énergies marines). Dans quelques années, des machines en formation quadrilleront tous les terrains, sur terre ou sous l’eau !

Nicolas Guillas

(1) Ce jeune chercheur fait partie de l’équipe Lagadic de l’Irisa, affiliée à Inria, l’Université de Rennes 1, l’Insa et le CNRS.
(2) Financé par l’Agence nationale de la recherche et Rennes Métropole, ce projet mobilise aussi un ingénieur, un postdoc et trois doctorants dans l’équipe Lagadic.
(3) Des quadrimoteurs MikroKopter de 2 kg.
(4) Au sein du Lab-Sticc UMR CNRS 6285.

Paolo Robuffo Giordano
Tél. 02 99 84 25 45
paolo.robuffo_giordano@irisa.fr

Raphaël Bourdon
Tél. 02 97 89 85 80
rbourdon@rtsys.fr

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