Des patients au cœur de l’innovation

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N° 348 - Publié le 12 janvier 2017
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Au sein du living lab du Pôle Saint-Hélier, la société Bym anime des ateliers pour tester son outil de stimulation du mouvement. Il est destiné aux personnes hémiplégiques qui souhaitent s’exercer en toute autonomie.

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À Rennes, un nouveau living lab permet de développer des outils intelligents pour les personnes en situation de handicap.

Au Pôle Saint-Hélier, un établissement rennais destiné à la rééducation des personnes en situation de handicap, les patients et le personnel soignant sont férus de robotique et d’innovation. En 2015 et 2016, ils ont notamment participé aux évaluations cliniques du projet Handiviz. Mis au point par l’équipe de recherche Lagadic de l’Irisa(1), à Rennes, il s’agit d’un fauteuil qui corrige la trajectoire de son utilisateur grâce à un module robotisé incorporé afin de ne jamais se cogner dans les murs ou les embrasures de portes(2). Il sera commercialisé par la société Ergovie dans les prochains mois sous l’appellation Feego.

Ce mois-ci, l’entreprise rennaise et l’Insa retrouveront les patients et le personnel du Pôle Saint-Hélier pour se lancer dans une nouvelle aventure : le projet Prisme.

 

Télécom Santé, la société rennaise qui a développé un lit communicant doté de capteurs optimisant la prise en charge médicale(3), se joindra également à eux. Ensemble, ils élaboreront un dispositif intelligent facilitant l’autonomie et le suivi des patients lorsqu’ils quittent leur lit pour rejoindre leur fauteuil, ou inversement. « Nos patients ont des difficultés motrices. Lors de leur transfert du lit au fauteuil, le risque de chutes est important, précise Bastien Fraudet, kinésithérapeute et membre de la cellule de recherche du Pôle Saint-Hélier. On pourrait très bien imaginer une surveillance vidéo, ou un transfert de technologie entre le fauteuil Feego et le lit communicant, afin qu’ils puissent communiquer entre eux et se comprendre. Le fauteuil pourrait ainsi se positionner tout seul près du lit. » Ces idées seront discutées parmi d’autres autour de la table, selon la démarche de conception participative qui caractérise les living labs.

Réfléchir tous ensemble

Prisme(4) est le premier projet officiel du living lab du Pôle Saint-Hélier. Celui-ci s’est doté d’un comité de pilotage qui réunit trois médecins, un responsable de stratégie et développement, et le réseau Breizh paralysie cérébrale (lire l’encadré). Bastien Fraudet en coordonne les projets. « Un living lab est avant tout un laboratoire de recherche et développement dans lequel l’usager a une place prépondérante. Il est intégré au projet dès son origine, il participe aux réflexions, aux tests et à l’évaluation du prototype », explique-t-il. Ce principe encourage les spécialistes de santé et les développeurs informatiques à croiser leurs regards et leurs compétences afin d’étudier en parallèle les besoins, les usages et les technologies disponibles. « Un tel processus accélère la mise sur le marché des dispositifs, car ils sont testés et améliorés au fil de leur développement, c’est un gain de temps énorme dont bénéficient les futurs usagers. » La démarche des living labs sous-entend également l’étude de l’acceptation et de l’appropriation, par les patients, leur entourage et le personnel, des nouvelles technologies lorsqu’elles ne sont qu’au stade de la science-fiction et, plus tard, lorsqu’elles sont réellement utilisées en centre spécialisé ou à domicile.

 

Un lieu d’expérimentation

Au Pôle Saint-Hélier, l’intérêt pour la coconception n’est pas nouveau. « Nous avions déjà adopté cette démarche, notamment avec la société rennaise Bym(5) pour créer un outil de stimulation du mouvement destiné aux personnes hémiplégiques pour qu’elles puissent s’exercer en toute autonomie. » C’est la rencontre avec Robert Picard, cofondateur du forum des living labs en santé et autonomie, qui a permis la naissance officielle du living lab rennais en juin dernier. « Ce forum regroupe une vingtaine de laboratoires en France. En faire partie nous apporte une légitimité et une visibilité auprès des entreprises locales et des financeurs, et nous aide à pérenniser nos méthodes de travail. » De nouveaux projets sont d’ailleurs déjà en cours de réflexion. « L’avantage du living lab, c’est aussi de pouvoir être directement à l’écoute des idées des patients. Ils ont exprimé le besoin d’avoir une application mobile qui les aiderait à trouver des toilettes publiques adaptées à leur handicap. » Le projet a été soumis aux étudiants de l’Insa. La Bretagne compte trois living labs en santé et autonomie. Les deux autres sont au centre de rééducation de Kerpape, à Ploemeur, et à Télécom Bretagne, à Brest. Ces trois lieux offrent un terrain d’expérimentation qui fédère les acteurs locaux. Une belle démarche au profit des premières concernées : les personnes en situation de handicap.

Première rencontre entre robotique et santé

Doit-on adapter l’environnement aux personnes en situation de handicap ou opter pour la réciproque grâce à la haute technologie ? « Les deux approches doivent être menées de front, jusqu’à ce que les deux chemins convergent », répond Anne Spalanzani, d’Inria Grenoble, lors de la première rencontre pluridisciplinaire “Innovation, robotique et santé”, le 9 décembre 2016, à Rennes. Organisée par le Pôle Saint-Hélier, le réseau Breizh paralysie cérébrale et Inria Rennes-Bretagne Atlantique, cette journée avait pour but de croiser les points de vue de la médecine, de l’ingénierie robotique et de la recherche, avec l’ambition de mettre les patients et l’éthique au cœur des discussions. Le living lab rennais et le fauteuil Feego ont été présentés à cette occasion (lire article ci-dessus). « Nous voudrions pérenniser ces rencontres, peu courantes en France actuellement, explique Benoît Nicolas, médecin au Pôle Saint-Hélier. Si elles pouvaient faire émerger des collaborations et faire bouger les lignes de la prise en charge médicale, ce serait génial ! »

Benoît Nicolas, tél. 02 99 29 50 99, benoit.nicolas@pole-sthelier.com
Klervi l’Hostis

(1) Institut de recherche en informatique et systèmes aléatoires.

(2) Lire Un fauteuil qui a les yeux en face des roues, Sciences Ouest n° 314-novembre 2013.

(3) Lire Des innovations sous les draps, dans Sciences Ouest n° 336 -novembre 2015.

(4) Sélectionné dans le cadre de l’appel à projets PME 2016, financé par la Bpi et la Région Bretagne pour trois ans, labellisé par le pôle de compétitivité Images & Réseaux.

(5) Lire Une appli pour faire le geste, dans Sciences Ouest n° 343-juin 2016.

Bastien Fraudet, tél. 02 99 29 50 99
bastien.fraudet@pole-sthelier.com

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