Des pesticides retrouvés dans les vers de terre

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N° 415 - Publié le 21 décembre 2023
© ROMAIN GEORGES / CNRS / ECOBIO RENNES
Prélèvement de vers de terre sur des prairies permanentes et des parcelles cultivées en Bretagne.

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Alors que l’Union européenne a reconduit l’utilisation du glyphosate pour dix ans, des chercheurs bretons cherchent à comprendre comment les vers de terre sont affectés par les pesticides.

Le plus célèbre herbicide n’est pas près de disparaître. Fin 2023, l’Union européenne a prolongé l’autorisation du glyphosate de dix ans. Une nouvelle qui fait écho aux travaux de Françoise Binet, directrice de recherche CNRS à Ecobio1, à l’Université de Rennes. « Tous les sols sont contaminés, même des prairies non cultivées », souligne celle qui a dirigé pendant cinq ans le bien nommé projet Buzhug, « ver de terre » en breton. Achevé en décembre, ce programme visait à comprendre les effets de pesticides sur nos chers amis du sous-sol.

Pour cela, des scientifiques ont comparé une population de vers de terre issus de parcelles agricoles cultivées en bio et d’autres en conventionnel. Ils ont observé une suractivation de deux voies métaboliques chez les vers exposés aux pesticides : celles de la respiration et de la détoxification. L’équipe a aussi remarqué que certains produits phytosanitaires s’accumulent dans l’organisme des vers de terre. On y retrouve par exemple des traces d’atrazine, un herbicide interdit depuis 20012, tandis que d’autres molécules abondantes dans le sol semblent être éliminées naturellement, comme celle du glyphosate. « Cela pourrait expliquer la surchauffe du mécanisme de détoxification chez les vers exposés, avance l’écologue. Mais cette dépense énergétique a un coût, qui se reporte sûrement sur la reproduction. » En clair, les vers de terre, trop épuisés à éliminer les pesticides de leur organisme, auraient moins d’énergie pour perpétuer l’espèce. « Les pesticides ne tuent pas forcément mais ont des effets plus insidieux pour la survie de la population », appuie Françoise Binet.

 Analyser la chaîne alimentaire


Son équipe a par ailleurs élargi ses recherches en intégrant les bécasses, un oiseau qui se nourrit principalement de vers de terre. Seize molécules de pesticides ont été retrouvées dans le sang de volatiles fréquentant les parcelles étudiées et leurs environs. S’il est impossible d’assurer avec certitude que cette contamination est due à l’ingestion des vers, reste un constat : les pesticides sont partout.

Violette Vauloup

1. Écosystèmes , biodiversité, évolution
2. S’il ne s’agit pas de la molécule la plus toxique, sa présence dans les vers démontre une forte rémanence de certains résidus de pesticides.

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