Lundi soir, 19h. Le moment que j’attendais avec impatience est arrivé. Je vais prendre les commandes du robot Victor.
Dans la cabine, deux sièges sont dédiés aux pilotes. Maxime Geay est assis sur le premier afin de gérer les déplacements de Victor. Il m’invite à m’installer sur le second pour manipuler Maestro, le bras du robot. En face de moi, une douzaine d’écrans sont allumés. La moitié d’entre eux diffuse les images du fond marin sous différents angles. Sur les autres s’affichent le balayage radar de la zone, le parcours de Victor sur une carte et toute une série de chiffres comme sa position, sa vitesse ou son poids. Devant moi, le « pantin », un bras miniature, me permettra de prendre le contrôle de Maestro. Une question me taraude : Victor peut-il se prendre une gifle en cas de faux mouvement ? Aucun risque, me dit-on, un mur virtuel est programmé pour empêcher ce genre d’incident. Me voilà rassurée, l’expérience peut commencer !
Attraper un caillou
Je flotte à 1700 m de profondeur environ, un peu au-dessus du sol océanique. Gris et rocheux, il prend des couleurs dès qu’on s’approche. Le silence règne. Je suis concentrée. L’exercice du jour me semble simple : je dois attraper un gros caillou.
Moins d’une minute m’est nécessaire pour comprendre la difficulté de la tâche. Les images que je reçois sont en deux dimensions, je dois donc regarder plusieurs écrans à la fois pour me diriger dans l’espace. Le pantin a six axes de rotation. Chaque mouvement me demande une longue réflexion.
J'essaie de prendre un caillou avec la pince.
Par à-coups, j’atteins mon objectif au bout d’un quart d’heure en laissant derrière moi une quantité de poussière impressionnante. Je suis plutôt satisfaite, bien que ma performance soit largement en deçà de celles des pilotes, capables d'insérer une sonde de température, sans égratignure, dans une fissure de quelques centimètres de largeur.
Mission réussie !
La dernière
C’était la dernière plongée de Victor. Le Pourquoi pas ? a quitté sa zone d’étude mardi soir à 19h. Dès son départ, les laboratoires se vidaient à grande vitesse.
Nous sommes arrivés au port de Horta en début d’après-midi aujourd’hui, mercredi. Quelques scientifiques et marins empilent les caisses de matériel sur le pont arrière tandis que d’autres finalisent leur rapport de mission sur ordinateur. La plupart d’entre nous débarque demain. Le navire reprendra sa route vers Brest avec une vingtaine de marins. Son voyage durera six jours…