Chercheurs en mer d’Iroise

N° 255 - Publié le 4 décembre 2014
© Yves Gladu

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Le parc naturel marin d’Iroise se met en place. les scientifiques vont y jouer un rôle clé.

Ce coin d’océan est notre île aux trésors. Créé en septembre 2007(1), le parc marin d’Iroise protège un environnement exceptionnel. « La logique du parc est la préservation de la biodiversité et le maintien de l’activité économique, sans exclure aucun acteur. C’est une approche intégrée du milieu maritime », résume Thierry Canteri, son directeur, nommé récemment. Premier du genre, le parc est géré par un conseil de gestion, où se réunissent les élus locaux, les administrations, les acteurs économiques, comme les pêcheurs ou les exploitants d’algues... et des experts, c’est-à-dire les scientifiques. Les collaborations débutent : « Entre le parc et les scientifiques, il y a un intérêt mutuel. Nous apportons notre connaissance concrète du terrain, les chercheurs nous éclairent sur les données existantes, par exemple sur les champs d’algues ou le maerl. »

Physique des milieux, biodiversité

« Nous allons travailler ensemble, de manière étroite, sur plusieurs points, confirme Yves-Marie Paulet, directeur adjoint de l’Institut universitaire européen de la mer (IUEM), qui regroupe 140 chercheurs à Brest. Qu’il s’agisse de physique des milieux, de sédimentologie, de biodiversité, des usages et de la gestion intégrée, nos laboratoires comptent des experts sur ces sujets. » L’Institut(2) va apporter une aide précieuse au parc pour l’observation du milieu marin, qu’il s’agisse du plancton toxique, des nitrates ou des polluants. Et le directeur du parc marin envisage d’employer des étudiants de l’IUEM. « Il faut du personnel qualifié pour un parc marin, confirme Yves-Marie Paulet. Nous formons 330 étudiants, dont 160 doctorants, dans notre école doctorale des sciences de la mer. » Les deux organismes ont aussi des projets d’investissements concertés. En 2009, l’IUEM disposera d’un navire scientifique « pour des prélèvements biologiques, des mesures physico-chimiques de l’eau ou de la cartographie sous-marine. » Le parc participera au financement des équipements et ses agents intégreront les missions en mer.

« Nous sommes demandeurs de données »

Mais les relations entre le parc et les acteurs scientifiques dépassent largement la dimension locale. Les moyens du parc sont gérés par l’Agence des aires marines protégées(3), toute récente également. L’un de ses objectifs est la création d’un réseau d’aires marines, d’ici 2012. Vaste programme, car l’espace marin de la France occupe 11 millions de km2... et 10% de ces eaux doivent être protégées. L’Iroise va servir de modèle. « Pour établir une stratégie en termes d’aires marines protégées, nous sommes très demandeurs de données sur les habitats naturels, les écosystèmes ou les usagers, explique Olivier Laroussinie, le directeur de l’agence. Nous avons des lacunes phénoménales dans la connaissance, surtout quand on va vers le large. Et il n’existe pas, par exemple, de cartographie des bassins de navigation des plaisanciers. »

L’agence vient de signer un accord-cadre avec l’Ifremer(4) et un autre accord devrait être signé avec l’IRD(5). Olivier Laroussinie a déjà rencontré les responsables du CNRS, des universités, les directeurs des stations marines et du muséum d’histoire naturelle. « Nous devons leur faire connaître nos demandes et les traduire en termes scientifiques. Nous nous intéressons, par exemple, à l’exploitation durable du champ d’algues : il faut connaître les espèces, leur physionomie, leur taux de renouvellement et leur croissance. Sans ces bases cognitives, la gestion ne peut pas se faire. » La mer d’Iroise devient ainsi un laboratoire pilote, où se met en place une nouvelle interface entre les gestionnaires d’un espace public, 100% marin, et les scientifiques.

“L’université est dans les gènes du parc”

Les scientifiques, qui vont apporter des informations clés pour administrer le parc, sont aussi à l’origine de sa création. « Le parc marin ne part pas de rien, rappelle Yves-Marie Paulet, directeur adjoint de l’Institut universitaire européen de la mer (IUEM). Sa création est l’aboutissement de la protection progressive du patrimoine marin de l’Ouest, commencée dans les années 60 avec la première réserve ornithologique de la SEPNB(6), poursuivie dans les années 80 avec la réserve de biosphère de l’Unesco, sur l’archipel de Molène. »
Les universitaires brestois ont toujours suivi de près la genèse du parc marin : en 1989, ils soutenaient le président du parc naturel d’Armorique, qui proposait déjà la protection du milieu marin.

Nicolas Guillas

(1)Après la loi du 14 avril 2006 sur les parcs nationaux, les parcs naturels marins et les parcs naturels régionaux.
(2)Les tutelles de l’IUEM sont l’Université de Bretagne occidentale, le CNRS et l’Ifremer.
(3)Créée par la loi du 14 avril 2006.
(4)Institut français de recherche pour l’exploitation de la mer.
(5)Institut pour la recherche et le développement.
(6)Société pour l’étude et la protection de la nature en Bretagne, aujourd’hui Bretagne Vivante.

Olivier Laroussinie
Tél. 02 98 33 87 67
olivier.laroussinie [at] aires-marines.fr (olivier[dot]laroussinie[at]aires-marines[dot]fr)
Thierry Canteri
Tél. 02 98 44 17 00
thierry.canteri [at] aires-marines.fr (thierry[dot]canteri[at]aires-marines[dot]fr)
Yves-Marie Paulet
Tél. 02 98 49 86 00
yves-marie.paulet [at] univ-brest.fr (yves-marie[dot]paulet[at]univ-brest[dot]fr)

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