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Indispensables Terres rares

N° 363 - Publié le 6 juin 2018

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Toujours plus présentes, parfois jugées indispensables pour la transition énergétique : le point sur les terres rares.

Quel est le point commun entre une éolienne, un moteur de voiture électrique, un panneau photovoltaïque, une batterie rechargeable, une fibre optique et un écran d’ordinateur ? L’électricité ? C’est vrai, mais pas seulement. Chacun de ces objets peut contenir des terres rares. Elles ne sont pas très connues, mais elles intéressent les chercheurs autant que les industriels. Ces matériaux ont même acquis le titre de “ressources stratégiques” pour de nombreux gouvernements, comme le pétrole, l’or ou l’uranium. Alors d’où vient cet intérêt ? Pour le saisir, il faut déjà savoir ce que sont ces terres rares, au nom trompeur. Ce club très sélect réunit dix-sept métaux (appelés scandium, yttrium et lanthanides pour les quinze autres) qui partagent des caractéristiques électromagnétiques rares. C’est de ces capacités que vient leur nom, car ces éléments ne sont pas si rares que cela ! « Ce ne sont pas les matières les plus critiques, signale Bernard Multon, professeur à l’ENS(1), et spécialiste du cycle de vie des productions d’énergie, au laboratoire Satie(2). L’or et le platine sont des métaux bien plus rares, et bien plus importants pour les objets électriques. »

Éolien offshore

Grâce à leur performance électromagnétique, les terres rares sont-elles nécessaires à la transition énergétique ? « L’un de leurs intérêts, en l’occurrence du néodyme et du dysprosium, est d’être utilisé dans les aimants de certaines génératrices d’électricité, explique Bernard Multon.

Sur une éolienne par exemple, les pales tournent lentement, à une vingtaine de tours par minute. La génératrice, elle, doit tourner beaucoup plus vite. Entre les deux, des engrenages mécaniques transmettent le mouvement des pales vers la génératrice, tout en augmentant sa vitesse. Le problème c’est que cette mécanique nécessite de l’entretien. Ce n’est pas embêtant sur terre, mais pour de l’éolien offshore, c’est un vrai problème. L’une des solutions est alors d’utiliser des terres rares : elles stockent de l’énergie et la redistribuent, pour entraîner la génératrice, sans nécessiter d’entretien. » Cette solution permet de réduire le poids de la génératrice, par rapport à une machine à électro-aimants classiques. On retrouve le même principe, dans le sens inverse, pour les voitures électriques, dont les moteurs contiennent des terres rares. Grâce à elles, l’énergie électrique est transformée de manière plus efficace en énergie mécanique, pour entraîner les roues.

Alors, ces terres rares sont-elles essentielles à la transition énergétique ? Pas forcément, même si la part d’éoliennes qui en contiennent augmente chaque année : elle dépasse 30 % aujourd’hui en Europe. « C’est le marché qui détermine le choix des solutions technologiques, poursuit Bernard Multon. Aujourd’hui, les terres rares ne sont pas chères, car elles sont extraites et transformées dans des pays qui ne respectent pas leur environnement. Si l’on intégrait également les coûts environnementaux de l’extraction dans leur prix, on se dirigerait sûrement vers d’autres technologies. »

Baptiste Cessieux

(1) École normale supérieure de Rennes.
(2) Systèmes et applications des technologies de l’information et de l’énergie.

Bernard Multon
tél. 02 99 05 93 08
bernard.multon@ens-rennes.fr

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