Quand les élèves crient au complot

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octobre 2019
À la recherche des fake news
NINA LUEC

La psychologie sociale permet de contrer les théories complotistes au collège.

Attention, les triangles sont partout ! Pour certains collégiens, cette figure géométrique est la preuve d’un complot des Illuminati1. Une société secrète dirigerait le monde… Bien sûr, la très grande majorité des élèves prend cela pour un jeu et n’y croit pas. Ce rapport des élèves à l’information attire toute l’attention des enseignants. Des ateliers sont organisés pour lutter contre les théories complotistes. « Mais ces dispositifs ne sont pas évalués », souligne Sylvain Delouvée, chercheur en psychologie sociale à l’Université Rennes 2.

« C’est louche ! »

Est-il toujours efficace de faire connaître une théorie fausse ? Un élève peut se dire que « si l’on dépense tant d’énergie à me dire que c’est faux… c’est louche ! » La psychologie sociale apporte des éléments de réponses. Elle s’intéresse à l’effet des autres sur nos comportements et nos pensées. Pourquoi agit-on différemment seul ou en groupe ? D'où viennent nos croyances et les rumeurs ?

Depuis l’an dernier, Sylvain Delouvée dirige le projet Conspiracy2. Cette année, le chercheur intervient au collège de Romillé, en Ille-et-Vilaine. Il veut savoir si les élèves adhèrent ou pas, fortement ou non, à des théories du complot.  Après une première mesure du “degré de complotisme”, les élèves de 4e suivent des ateliers avec le documentaliste et les enseignants d’histoire-géographie. L'effet de ces travaux encadrés est évalué grâce à une seconde mesure du degré de complotisme des élèves.

Toute la difficulté, lors d’une expérience en psychologie sociale, consiste à  ruser. L’enquêteur ne peut pas dire ou-vertement ce qu’il cherche à mesurer... « Pour une expérience sur le degré de complotisme, je prétends mener une étude sur la lecture. Les jeunes doivent lire plusieurs phrases. Ils ne le savent pas, mais certaines sont extraites de théories complotistes. Je leur demande ensuite ce qu’ils ont retenu. »

Rétablir la vérité

Souvent, les personnes les plus sensibles au complotisme retiennent mieux les phrases qui vont dans leur sens. À la fin de l’expérience, Sylvain Delouvée souligne l'importance de rétablir la vérité.

Parmi ses observations, le psychologue a noté que les élèves de milieux favorisés n’ont pas plus d’esprit critique que les autres. Autre constat : plus on a d’esprit critique, moins on est complotiste. Y a-t-il un lien de cause à effet ? L’enquête se poursuit.

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ALICE VETTORETTI

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