L’obésité se transmet-elle ?

N° 324 - Publié le 14 octobre 2014
© Inra
Nés d'une mère au régime trop gras et trop sucré, ces porcelets vont-ils garder une attirance vers ces produits ?

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Les chercheurs étudient le caractère transmissible de l’obésité pendant la grossesse et après la naissance.

L’obésité lors de la grossesse prédispose-t-elle au risque d’obésité et de diabète chez l’enfant ? Des travaux existants mentionnent que oui et que ce lien existe indépendamment de la transmission génétique. En tenant compte de cette hypothèse, l’équipe brestoise de Jacques Delarue s’est demandé, toujours dans le cadre du projet Metab n-3 mené par la Structure fédérative de recherche brestoise (lire article ci-contre), si l’administration d’oméga-3 marins réduit la transmission du risque à la progéniture, en l’occurrence chez des rates gestantes.

Le fœtus s’imprègne

La réponse est positive : ces acides gras semblent protéger de la transmission du risque materno-fœtal. Sans eux, le fœtus s’imprègne, via le placenta, des anomalies de la mère qui le marquent et peuvent se manifester plus tard chez lui également y compris lorsqu’il devient adulte. La concentration anormale dans le sang maternel de certaines molécules (glucose, acides gras libres...) laisse son empreinte. La programmation métabolique de l’enfant est ainsi influencée par le dérèglement métabolique de la mère. Les oméga-3 marins empêchent cette empreinte, du moins en ce qui concerne la prise de poids et la sensibilité à l’insuline (insulino-résitance). Par contre, les quantités administrées expérimentalement aux rates ne sont pas transposables aux humains. L’équipe s’apprête à publier le détail de ces expérimentations.

Et après la naissance ?

De leur côté, les chercheurs de l’unité Alimentation et adaptations digestives, nerveuses et comportementales (ADNC), du centre Inra de Saint-Gilles (Ille-et-Vilaine)(1), étudient l’influence que peut avoir l’alimentation de la mère gestante et allaitante sur le comportement et la santé de ses petits. Pour ce projet, ils ont nourri, pendant leur gestation et la lactation, un groupe de minitruies avec un régime trop gras et trop sucré, pendant qu’un groupe témoin avait droit à un régime classique. Depuis que les porcelets sont nés, les chercheurs réalisent différentes mesures. « Nous avons déjà remarqué que les laits des mères soumises au régime gras étaient beaucoup plus riches en lipides, explique David Val-Laillet, directeur de l’unité ADNC responsable du projet, et l’activité des bactéries qui peuplent leur système digestif est modifiée et chez leurs porcelets aussi. » Depuis le début du sevrage, l’ensemble des porcelets reçoit un régime équilibré, mais des différences persistent. « Nous testons actuellement la motivation de ces porcelets pour le gras et le sucre, ainsi que leurs capacités cognitives, car nous savons que l’obésité et la malnutrition précoces affectent certaines fonctions cérébrales, notamment le circuit de la récompense et les zones de l’apprentissage. Nous voulons voir si cela se transmet de la mère aux petits. » Dès 2015, les prochains résultats devraient permettre de dire si ces anomalies comportementales et cérébrales perdurent à l’âge adulte.

Michèle Le Goff / Céline Duguey

(1)Également membre de la Structure fédérative de recherche sur l’étude des oméga-3 d’origine marine sur les pathologies liées à l’obésité, dirigée par Jacques Delarue.

Jacques Delarue
Tél. 02 98 34 71 41
jacques.delarue [at] univ-brest.fr (jacques[dot]delarue[at]univ-brest[dot]fr)

David Val-Laillet
Tél. 02 23 48 50 72
david.val-laillet [at] rennes.inra.fr (david[dot]val-laillet[at]rennes[dot]inra[dot]fr)

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