Âge de l’Homme, âge du plastique ?
Plastique, quand la magie prend fin
TOUT LE DOSSIER
du magazine Sciences Ouest
La réputation largement répandue de la Bretagne, selon laquelle ses habitants seraient en grande partie alcooliques, proviendrait des habitudes de consommation d’antan.
Entre la Bretagne et Paris, Jean Painlevé a passé sa vie à vulgariser la science à travers le cinéma. Retour sur le parcours d’un anticonformiste résolument moderne.
Alors que l’Union européenne a reconduit l’utilisation du glyphosate pour dix ans, des chercheurs bretons cherchent à comprendre comment les vers de terre sont affectés par les pesticides.
Le plus célèbre herbicide n’est pas près de disparaître. Fin 2023, l’Union européenne a prolongé l’autorisation du glyphosate de dix ans. Une nouvelle qui fait écho aux travaux de Françoise Binet, directrice de recherche CNRS à Ecobio1, à l’Université de Rennes. « Tous les sols sont contaminés, même des prairies non cultivées », souligne celle qui a dirigé pendant cinq ans le bien nommé projet Buzhug, « ver de terre » en breton. Achevé en décembre, ce programme visait à comprendre les effets de pesticides sur nos chers amis du sous-sol.
Pour cela, des scientifiques ont comparé une population de vers de terre issus de parcelles agricoles cultivées en bio et d’autres en conventionnel. Ils ont observé une suractivation de deux voies métaboliques chez les vers exposés aux pesticides : celles de la respiration et de la détoxification. L’équipe a aussi remarqué que certains produits phytosanitaires s’accumulent dans l’organisme des vers de terre. On y retrouve par exemple des traces d’atrazine, un herbicide interdit depuis 20012, tandis que d’autres molécules abondantes dans le sol semblent être éliminées naturellement, comme celle du glyphosate. « Cela pourrait expliquer la surchauffe du mécanisme de détoxification chez les vers exposés, avance l’écologue. Mais cette dépense énergétique a un coût, qui se reporte sûrement sur la reproduction. » En clair, les vers de terre, trop épuisés à éliminer les pesticides de leur organisme, auraient moins d’énergie pour perpétuer l’espèce. « Les pesticides ne tuent pas forcément mais ont des effets plus insidieux pour la survie de la population », appuie Françoise Binet.
Son équipe a par ailleurs élargi ses recherches en intégrant les bécasses, un oiseau qui se nourrit principalement de vers de terre. Seize molécules de pesticides ont été retrouvées dans le sang de volatiles fréquentant les parcelles étudiées et leurs environs. S’il est impossible d’assurer avec certitude que cette contamination est due à l’ingestion des vers, reste un constat : les pesticides sont partout.
1. Écosystèmes , biodiversité, évolution
2. S’il ne s’agit pas de la molécule la plus toxique, sa présence dans les vers démontre une forte rémanence de certains résidus de pesticides.
Gagner la médaille d’or de canoë-kayak aux Jeux Olympiques peut se jouer à la seconde près. Mais « aujourd’hui, les données d’entraînement sur l’eau reposent essentiellement sur des observations trop imprécises pour permettre aux entraîneurs et aux athlètes d’améliorer leurs compétences », décrit Souebou Bouro, doctorant en télécommunications à l'Irisa1, à Rennes. Avec des spécialistes en biomécanique et en électronique, il teste un système de capteurs à même le kayak. Les données recueillies permettent d’estimer plusieurs paramètres dont l’angle d’entrée optimal de la pagaie dans l’eau pour favoriser la propulsion de l’athlète. De même, l’instrumentation du cale-pied, du siège et du bateau offre des données sur le mouvement du sportif et son interaction avec l’eau, ouvrant des possibilités d’améliorations ergonomiques. « Nous devons encore travailler sur l’étanchéité du système de capteurs, l’efficacité énergétique et sur la transmission des données en temps réel à l’entraîneur », souligne toutefois Souebou Bouro.
1. Institut de recherche en informatique et systèmes aléatoires.
Avec la hausse des températures, les vins sont plus alcoolisés et des régions comme la Bretagne deviennent viticoles. C’est l'une des conclusions du projet de recherche VinAdapt, regroupant des laboratoires et des universités françaises et néozélandaises depuis 2019. L’objectif ? Développer des scénarios d’adaptation au changement climatique de la vigne. Pour ce faire, des capteurs météorologiques ont été installés sur des parcelles, offrant un bilan climatique aux viticulteurs. Ainsi, ils peuvent réfléchir à changer de cépages ou à planter les vignes plus en altitude pour trouver de la fraîcheur. Mais les recherches ne s’arrêtent pas là : le programme AgriForAdapt prend le relai. Jusqu’en 2028, une trentaine de scientifiques vont étudier l’impact du dérèglement climatique sur d’autres cultures, telles que les pommes et le houblon. « Nous allons aussi observer comment l’environnement et la topographie s'organisent si nous changeons les variétés ou les espèces au sein des exploitations », précise Hervé Quénol, directeur de recherche CNRS au laboratoire LETG1 à Rennes et coordinateur du projet.
1. Littoral, environnement, géomatique, télédétection.
Face à l’urgence climatique et à l’inaction politique, certains scientifiques sortent de leur laboratoire pour être entendus. Né en 2020, le collectif national Scientifiques en rébellion compte plus de 1500 sympathisants et prône la désobéissance civile. Rencontre avec Kaïna Privet, écologue rennaise et militante.
La Maison pour la science en Bretagne organise les 30 et 31 janvier une formation à destination des enseignants pour parler de la sexualité sous le prisme de la recherche.
« Il y a déjà une liste d’attente », nous confie Jacques Bouffette, référent SVT à la Maison pour la science en Bretagne. Depuis bientôt trois ans, la formation « Cerveau, sexualité et plaisir », est victime de son succès. Portée par l’Académie et l’Université de Rennes, cette offre destinée aux professeurs souhaitant approfondir leurs connaissances affichait déjà complet deux mois avant le jour J, fin janvier.
Le projet remonte à 2019, où un chapitre sur la procréation et la sexualité humaine fait son entrée dans le programme de SVT en seconde. Problème : certains enseignants ont l’impression de manquer d’informations et d’outils. Beaucoup font également face à des élèves qui s’interrogent sur leur genre ou leur sexualité, et les questions s’accumulent. « Les inscrits à la formation viennent souvent pour trouver les bons mots », témoigne Sylvie Fortin, professeure en biologie à l’Institut Agro Rennes-Angers et ancienne enseignante de SVT. Depuis 2020, elle fait partie du binôme de formateurs qui accompagne les enseignants, avec Thierry Charlier, chercheur à l’Irset1 et professeur de biologie à l’Université de Rennes.
« Les enseignants connaissent par cœur le cycle hormonal et le rôle des chromosomes dans la différenciation sexuelle, souligne ce dernier. En revanche, ils ne savent pas ce qu’il se passe dans les différentes zones du cerveau lors d’un comportement sexuel. » Le chercheur présente donc aux quinze participants annuels les fondements neurobiologiques de la sexualité en s'appuyant sur des recherches récentes. « Chez l’Homme, on n'associe plus la sexualité à la reproduction, rappelle-t-il. Il existe des bases biologiques, comme le développement de zones cérébrales spécifiques, qui peuvent faire pencher l’attirance d’un individu vers un genre ou un autre. » À cela s’ajoute la forte influence sociale et environnementale dans la mise en place de l’identité sexuelle.
« Les thématiques que l’on aborde durant ces temps d'échanges correspondent aux séances d’éducation à la sexualité, dispensées par des professeurs volontaires dès le collège », explique Sylvie Fortin qui connaît bien les programmes scolaires. Jamais à court d’idée, elle a aussi prévu un speed-dating scientifique pendant les six heures de formation. Les participants apprennent les uns des autres. « C’est d’ailleurs un outil pédagogique à réutiliser avec les élèves ! »
1. Institut de recherche en santé, environnement et travail.
À la Cité des Télécoms, à Pleumeur-Bodou, des siècles d’histoire renaissent de leurs cendres à travers une expérience en réalité virtuelle consacrée à Notre-Dame de Paris.
C’est une aventure qui commence dans les ruelles de Paris. Un aimable guide accompagne le voyageur pour lui conter l’histoire de Notre-Dame, qui s’ouvre le soir de l’incendie de la cathédrale, en avril 2019. Cette dernière se dresse devant le spectateur, en proie aux flammes avant que le décor ne change soudainement pour un retour 800 ans en arrière. Le parvis prend alors ses traits du 12e siècle, au début de la construction. Devant l’édifice, le voyageur peut admirer le travail des tailleurs de pierre pour ensuite entrer dans la cathédrale. Les couleurs intenses des vitraux attirent immédiatement le regard et des personnages historiques, tels que Napoléon, Henri d’Artois ou encore Charles de Gaulle, parcourent la nef.
La déambulation dans le monument met à l’épreuve le visiteur et l’invite à monter sur des plateformes, notamment pour s’élever jusqu’aux célèbres cloches. La balade dans la « forêt » de Notre-Dame, la charpente qui s’est embrasée durant l’incendie, est suivie d’une escapade au sommet d’une des tours. De là, le voyageur peut profiter d’un magnifique panorama de Paris et observer le travail des bâtisseurs s’attelant à la construction de la cathédrale. Il peut également écouter l’architecte Eugène Viollet-le-Duc lui raconter la conception de la flèche qui culmine à 96 mètres. Ce voyage poétique qui révèle les sources d’inspiration de Victor Hugo, fait également des parallèles avec la restauration actuelle de Notre-Dame en mettant en lumière les différents artisans qui y participent, comme les charpentiers.
© CITE DES TELECOMS
Muni d'un casque et de manettes, le visiteur déambule virtuellement dans Notre-Dame.
Cette expérience immersive, conçue par la société Emissive et financée par le groupe Orange, a été proposée à une centaine de volontaires durant les Journées du patrimoine et la Fête de la science à la Cité des Télécoms, située dans la ville de Pleumeur-Bodou (Côtes-d'Armor). Le but ? Tester le matériel de réalité virtuelle et recueillir les impressions du public. « Avant de commencer l’immersion, je prends toujours une vingtaine de minutes pour expliquer l’historique du projet mais aussi le fonctionnement du casque et des deux manettes. Les participants, selon leur habitude des jeux numériques, ne les manient pas avec la même facilité », sourit Victor Riche, responsable des partenariats et de l’innovation à la Cité des Télécoms.
Le dispositif permet de naviguer dans un espace défini, et de rapprocher, grâce aux manettes, une scène ou un objet jusqu’à soi. Cela amène un autre point technique à prendre en compte : la maîtrise de la zone de jeu. Dans la salle d’exposition, le médiateur balaie l’espace de la main, dans laquelle il tient une manette. Ce cercle virtuel est un périmètre de sécurité, il évite les collisions car l’expérience peut se faire debout et à plusieurs. « Dès que vous serez à 50 cm de cette ligne, vous verrez un quadrillage lumineux se matérialiser devant vous », indique Victor Riche.
Les retours sont très positifs. Chacun a une raison particulière d’aimer ce lieu, pour sa valeur historique, architecturale ou religieuse. La visite virtuelle de la cathédrale peut faire revivre des émotions fortes à ceux qui ont vécu des expériences marquantes dans le monument. « Le public est intéressé, aussi bien par le contenu que par l’aspect immersif », raconte le médiateur. Et pour cause : avec l’utilisation de données scientifiques et historiques, la reconstitution numérique de Notre-Dame est frappante de réalisme. Cette expérience va-t-elle s’inscrire à la programmation quotidienne de la Cité des Télécoms ? Une étude de faisabilité est en cours, « la décision n’est pas encore prise ». À suivre !